De passage à Strasbourg ? Envie de découvrir quelques éléments en lien avec l’histoire européenne de la ville ?!
Faites cette balade à l’aide de l’audioguide sur l’application izi.travel (Application gratuite sur androïd et Apple Store) ou suivez simplement les étapes présentées plus bas sur cette page web.
Bonne balade à tous !
Strasbourg est le siège de multiples institutions et organismes européens et son Quartier européen fait aujourd’hui partie des lieux de visite incontournables de la ville. Ce quartier s’est vu décerner, en décembre 2015, le Label du Patrimoine Européen. Ce label, créé en 2007 par la Commission Européenne, vise à mettre en valeur la dimension européenne des biens culturels, monuments, sites naturels ou urbains et lieux de mémoire, témoins de l’histoire et de l’héritage européen. Son ambition est de renforcer le sentiment d’adhésion des citoyens de l’Europe à une identité européenne commune et de favoriser leur sentiment d’appartenance à un espace culturel commun. Il encourage le respect, la connaissance et l’attachement des citoyens européens à leur patrimoine.
Mais l’histoire de l’Europe à Strasbourg ne se résume pas simplement au Quartier européen de la ville. Plusieurs pages de cette même histoire se sont également écrites dans le centre-ville de Strasbourg : Place Kléber, Place Broglie ou encore Place de l’Université… les lieux sont nombreux et les faits historiques de taille. Nous vous invitons désormais à partir à la découverte…
Parcours à pieds – “Strasbourg, l’Européenne” en 9 étapes à partir du centre-ville et jusqu’au Quartier européen
Durée approximative : 1,5 heure – distance : 3,5 km
Départ : Place Kléber
Arrivée : Centre d’Information sur les Institutions Européennes
8, rue Boecklin 67000 Strasbourg
Pour venir en transports en commun : Tram E – arrêt Boecklin/Lieu d’Europe
Le 12 août 1949, Winston Churchill, devant une foule immense réunie Place Kléber à Strasbourg, rend hommage au Conseil de l'Europe, dont le Statut a été signé trois mois plus tôt, le 5 mai 1949 à Londres. Il crée l’événement en s’adressant à la foule en français :
« Dans cette ville ancienne, et encore marquée par les blessures anciennes, nous sommes réunis pour former une assemblée qui, nous l’espérons, sera un jour le Parlement de l’Europe. (…). Nous sommes réunis ici, dans cette assemblée nouvelle, non pas comme représentants de nos divers pays ou de différents partis politiques, mais comme des Européens, marchant en avant, la main dans la main et s’il le faut au coude à coude, pour faire revivre les gloires anciennes de l’Europe et permettre à cet illustre continent de reprendre, dans une organisation mondiale sa place de membre indépendant et se suffisant à lui-même ». (…) « Nos espoirs et notre travail tendent vers une époque de paix, de prospérité et de plénitude, où l’inépuisable richesse et génie de l’Europe feront d’elle, une fois de plus, la source même et l’inspiration de la vie du monde ».
Strasbourg qui avait tant souffert de la guerre, deviendra désormais un symbole de la paix. Pendant toute une semaine, du 8 au 13 août 1950, les 10 pays fondateurs du Conseil de l'Europe vont façonner le fonctionnement de cette nouvelle Assemblée dont le siège est à Strasbourg.
Rassemblant les Ministres des Affaires étrangères des États membres (10 pays à l’époque), le Comité des Ministres, l’instance de décision du Conseil de l’Europe, tiendra sa toute première session dans le Grand Salon de l’Hôtel de Ville de Strasbourg dans la semaine du 8 au 13 août 1949.
Cette session est ouverte par Robert Schuman, alors Ministre français des Affaires étrangères. A l’ordre du jour notamment plusieurs points relatifs au fonctionnement de cette nouvelle organisation :
les relations entre le Comité des Ministres (l'organe décisionnel exécutif) et de l’Assemblée consultative (l'organe délibérant) du Conseil de l’Europe;
la nomination du Secrétaire général de l’institution (le diplomate français, Jacques-Camille Paris, directeur d’Europe du Quai d’Orsay);
des questions budgétaires et administratives (notamment les modalités de la consultation entre les membres du Comité des Ministres en dehors des sessions qui sera finalement assurée par des délégués des Ministres au sein de représentations permanentes);
la création d'un mécanisme permettant de régler pacifiquement d'éventuels différends entre pays membres (mission finalement confiée à la Cour européenne des droits de l'Homme à partir de 1959);
l’admission de nouveaux membres (le Comité des Ministres ayant invité la Grèce, l’Islande et la Turquie à devenir membres de l’organisation également).
Durant toute cette semaine, Strasbourg a des allures de vraie capitale européenne et toute la presse internationale couvre largement l’événement pour parler de cette nouvelle organisation qui fait ses premiers pas à Strasbourg.
Vous ne le saviez peut-être pas mais la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin (CCNR) qui a son siège à Strasbourg est la plus ancienne organisation intergouvernementale au monde !! Elle a été créée en 1815 lors du Congrès de Vienne. D’abord établie à Mayence en Allemagne, elle est installée à Strasbourg, au Palais du Rhin, depuis 1920.
Cette organisation interétatique, composée de 5 Etats membres (Allemagne, Belgique, France, Pays-Bas, Suisse) est en charge de toutes les questions relatives à la navigation intérieure sur le Rhin. Elle intervient dans les domaines technique, juridique, économique social et environnemental touchant au transport rhénan sur les 900 km du fleuve, allant de Bâle en Suisse jusqu’à Rotterdam au Pays-Bas. La CCNR s’intéresse aussi aux effets du changement climatique sur la voie fluviale rhénane et bien entendu aux questions de sûreté et de disponibilité de la voie navigable.
Le bâtiment dans lequel est hébergé justement la Commission Centrale pour la Navigation du Rhin est lui aussi chargé d'histoire. Inauguré en 1888 après cinq ans de construction, le Palais du Rhin – autrefois appelé « Kaiserpalast » car initialement destiné à accueillir l’Empereur Guillaume Ier de Hohenzollern lors de ses passages à Strasbourg - est transformé en hôpital militaire durant la Première Guerre mondiale et portera le nom « Lazarett – Kaiserpalast ». En 1920, avec l'installation de la CCNR, l’ancienne demeure impériale prendra finalement le nom de « Palais du Rhin ». Ce bâtiment, dont la démolition avait été brièvement évoquée au milieu des années 1950, est classé monument historique depuis 1993.
C'est le 10 août 1949 que l’Assemblée consultative du Conseil de l’Europe tiendra sa toute première séance - à Strasbourg elle aussi - dans l'aula du Palais Universitaire, en présence notamment d'Edouard Herriot, de Paul-Henri Spaak, de Carlo Sforza, d'Ernest Bevin et bien sûr de Robert Schuman.
C’est la première expérience d’un Parlement international, composé de représentants de plusieurs Etats membres élus démocratiquement. Lors de cette séance inaugurale, Paul-Henri Spaak, Ministre belge des Affaires étrangères, sera élu premier président de l’Assemblée à l’unanimité. Sera également élaboré l’ordre du jour pour la toute première session de l’Assemblée consultative. Parmi les points proposés pour discussion par l’Assemblée puis validés par le Comité des Ministres en toute fin de session, le 13 août 1949 :
le rôle du Conseil de l'Europe dans le domaine économique, compte tenu des organisations internationales déjà existantes (sauf les questions relatives à la défense nationale, délibérément exclues) ;
les méthodes pour développer la coopération culturelle entre pays membres;
la coopération en matière de recherche scientifique entre pays membres et la mise en commun des ressources en matières premières et énergie ;
la création d'une nationalité commune européenne, et éventuellement d’un passeport européen afin d'uniformiser les dispositions législatives des pays membres concernant la condition juridique des étrangers ;
Par ailleurs, le Comité des Ministres évoquera aussi le souhait que l'Assemblée prenne en considération la question de la définition concrète des droits de l'Homme et les mesures à prendre en vue de les protéger et les développer.
Par la suite, certains points relèveront effectivement directement des missions du Conseil de l’Europe (ex. la coopération culturelle ou encore la protection des droits de l'homme avec la Convention européenne des droits de l'Homme entrée en vigueur en septembre 1953), tandis que d’autres points figureront plutôt parmi les missions de la future Communauté européenne (ex. la mise en commun des ressources en matières premières et énergie ou encore le passeport européen).
Aujourd’hui, l'Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (couramment appelée APCE - Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe - depuis 1974) regroupe 324 représentants (et autant de suppléants) issus des parlements des 46 Etats membres. L’APCE se réunit quatre fois par an à Strasbourg pour débattre de questions d’actualité, demander aux gouvernements européens de prendre des initiatives et rendre des comptes.
Pendant plusieurs années, la Villa Knopf - magnifique demeure de style Art Nouveau, située Rue Schiller et construite en 1904-1905 par les architectes Gustave Krafft et Jules Berninger - a accueilli un Centre universitaire des hautes études européennes, créé en 1953 suite à un commun accord entre le Conseil de l'Europe et l'Université de Strasbourg, avec pour mission de former à l'Europe et d'en faire un objet de recherche. A l'époque, les universités offrant ce genre de formations étaient effectivement plutôt rares, la capitale alsacienne ayant en plus l'immense avantage d'avoir plusieurs institutions et organismes à vocation européenne directement sur place. Pour ses enseignements, ce centre - qui prendra ensuite le nom de Institut des Hautes Etudes Européennes (IHEE) - bénéficiera pleinement de la proximité immédiate des institutions du Quartier européen.
En 2013, l'IHEE a finalement fusionné avec l'Institut d'Etudes Politiques (IEP) de Strasbourg, devenant ainsi une composante de Sciences Po Strasbourg, installées depuis mars 2021 au Cardo, un tout nouveau bâtiment dans l'enceinte des Hôpitaux universitaires au centre-ville de Strasbourg. La Villa Knopf quant à elle appartient toujours à l'Université de Strasbourg.
C'est dans la Villa Schützenberger - une autre villa de style Art Nouveau construite comme la Villa Knopf par les architectectes Gustave Krafft et Jules Berninger - située au n°76 de l'Allée de la Robertsau que s'est installé au début des années 1990 l'Observatoire européen de l’audiovisuel du Conseil de l’Europe.
Créé en décembre 1992, cet Observatoire, qui dépend du Conseil de l'Europe, s'occupe de la collecte et à la diffusion de l’information sur les industries audiovisuelles en Europe (cinéma, télévision, vidéo et nouveaux médias). Il a pour mission l’amélioration de la transparence dans le secteur audiovisuel en Europe. Il publie les résultats de son travail sous forme de rapports, lettres d’information, publications en ligne et bases de données accessibles gratuitement sur son site, tels que Lumière, une base de données sur les entrées de films distribués en salle, Lumière Vod, un répertoire des films européens disponibles sur les services de VOD en Europe ou encore Iris Merlin, une base de données d'informations juridiques relatives au secteur audiovisuel en Europe. Chaque année, l'Observatoire européen de l'audiovisuel publie également un annuaire en ligne comprenant des analyses et des données clés sur plus de 30 thématiques en lien avec le marché audiovisuel européen.
Le Conseil de l’Europe, installé à Strasbourg à partir de 1949, sera effectivement une étape décisive sur le chemin de l’espoir et de la paix en Europe. L’implantation du siège de l’organisation à Strasbourg fait suite à une proposition du Ministre britannique des Affaires étrangères Ernest Bevin. Selon lui, ayant été pendant des siècles au cœur des conflits franco-allemands, la capitale alsacienne doit désormais devenir le lieu symbolique de la réconciliation européenne. Pour Robert Schuman, le Ministre des Affaires étrangères français, ce choix revêt effectivement « une signification symbolique ». D’autres se demanderont si Ernest Bevin n’avait pas plutôt proposé cette ville pour exiler la nouvelle organisation internationale en province…
La capitale alsacienne se lancera dès 1949 dans la construction d’une « Maison de l’Europe » face au Parc de l’Orangerie afin d’y accueillir cette première organisation intergouvernementale fondée en Europe après la fin de la Deuxième Guerre mondiale. Ministres et parlementaires s’y retrouveront régulièrement pour débattre. A partir de 1952, le Conseil de l’Europe va même partager ses locaux avec l’Assemblée commune de la Communauté européenne du charbon et de l’acier (la CECA) qui viendra également tenir ses sessions dans la capitale alsacienne. Le choix de Strasbourg présentait avant tout un aspect pratique du fait que la plupart des députés siégeaient dans les deux assemblées.
Rapidement, les locaux provisoires du Conseil de l’Europe vont toutefois s’avérer inadaptés à l’accueil des deux organisations. Le Conseil de l’Europe va s’élargir à d’autres Etats et le succès de l’organisation sera conforté par son déménagement dans des nouveaux locaux le 28 janvier 1977. De manière symbolique, le Palais de l’Europe (réalisé par l’architecte français Henry Bernard) est conceptualisé pour « affirmer, par la musculature de sa plastique extérieure, que l’union fait la force, tout en manifestant, par son ambiance intérieure souriante et sereine où dominent les courbes, la cordialité confiante nécessaire à la libre confrontation des idées ». L’édifice de 64.000 m² contient 1000 bureaux, 17 salles de réunion ainsi qu’un hémicycle de 600 places situé au centre du bâtiment.
Le Conseil de l'Europe compte aujourd'hui 46 Etats membres. Sa principale mission est de favoriser la démocratie et les respect des droits fondamentaux en Europe. Parmi ses moyens : la conclusion d'accords internationaux. Ce vaste système de protection du Conseil de l'Europe comprend aujourd'hui plus de 220 conventions différentes, la pièce maitresse étant bien entendu la Convention européenne des droits de l'Homme.
Créée en 1959, la Cour européenne des droits de l’Homme - bras judiciaire du Conseil de l’Europe - est chargée de faire respecter les droits fondamentaux inscrits dans la Convention européenne des Droits de l’Homme, adoptée en 1950 par le Conseil de l’Europe et entrée en vigueur en septembre 1953. Cette Convention - désormais obligatoire pour tous les pays membres du Conseil - définit les droits et les libertés que les États membres s’engagent à garantir à leurs citoyens tels que le droit à la liberté d’expression et à la liberté de pensée, de conscience et de religion. Font également partie de ces droits la protection contre la discrimination de même que l’interdiction de l’esclavage et de la torture.
Depuis 1995, la Cour européenne des droits de l'Homme est installée Quai Ernest Bevin, au Palais des droits de l'Homme, un bâtiment conçu par l’architecte britannique, Lord Richard Rogers, également créateur du Centre Georges Pompidou à Paris et du Millenium Dome de Londres. Vu de face, le bâtiment évoque la balance de la justice avec ses deux salles d'audience cylindriques autour de l'entrée centrale. Le bâtiment est souvent aussi appelé « le navire » en raison de son allure de bateau amarré à la rivière "l'Ill" qui traverse Strasbourg.
46 juges (un par Etat ayant ratifié la Convention européenne des droits de l'Homme) et environ 650 agents du greffe travaillent au quotidien dans ce bâtiment et veillent au respect des droits de l’homme de 700 millions d’Européens des 46 Etats membres du Conseil de l’Europe. Toute personne s’estimant victime d’une violation par un État des dispositions de la Convention peut porter plainte devant la Cour.
Vous ne le saviez peut-être pas mais un fragment du mur de Berlin - un don de l’Allemagne au Conseil de l'Europe - est exposé à l'avant du bâtiment. Les 4 panneaux ont une valeur emblématique du rapprochement de l’Europe de l’Ouest et de l’Europe de l’Est après 28 ans de division et de séparation. On peut d'ailleurs y lire le mot « Freiheit » (liberté en Allemand).
Vous voici devant la Villa Kaysersguet, dernière étape de votre balade. Dans cette demeure ont résidé successivement un conseiller du Roi Louis XV, le premier magistrat de Strasbourg et le fondateur des Neueste Nachrichten (ancêtre du journal les Dernières Nouvelles d’Alsace)… Devenue propriétaire des lieux en 1926, la Ville de Strasbourg y logea des membres de son administration, parmi lesquels l’architecte de la ville, Henri Jung. La famille de Paul Wach, sénateur et ancien adjoint au maire, occupera le domaine jusqu’en 2006, d’où l’appellation parfois employée de « Villa Wach ».
Aujourd'hui, cette propriété - baptisée "Lieu d'Europe" en 2014 - est devenue un lieu d’éducation à la citoyenneté européenne ouvert à tous, qui a pour vocation de faire connaître l’Europe aux citoyens. Il abrite au premier étage le Centre d’Information sur les Institutions Européennes. Cette association fait partie du réseau d’information "Europe Direct" de l’Union européenne dont la vocation est justement d'informer sur l'Europe et l'Union européenne.
N'hésitez pas à rentrer pour visiter l'exposition permanente du Lieu d'Europe et découvrir la mine d'information mise à votre disposition par le Centre d'Information sur les Institutions Européennes.
Crédits photos : © Conseil de l’Europe – © European Union – © Commission européenne © CIIE